Ainsi les musiques amplifiées constituent-elles désormais un champ important de ces pratiques : elles amènent les institutions de formation au devant de questions nombreuses sur la pertinence de leur action vis-à-vis de ces musiques, et sur les manières d’y former ceux qui le demandent. Comment, par exemple, accompagner des pratiques qui, pour l’essentiel, se sont développées hors des institutions ? Les musiques traditionnelles se transforment elles aussi, en même temps que les vecteurs de leur diffusion se multiplient et que les autres genres musicaux leur empruntent de plus en plus, aussi bien sur les plans artistiques que techniques. Depuis les années 60, l’apparition des moyens mécaniques de conserver et de diffuser la musique, en élargissant la connaissance des musiques du monde, a entrainé une demande sans cesse croissante de formation à ces pratiques : comment y répondre, en tenant compte qui plus est de la singulière diversité de ces musiques ?
La musique contemporaine a, dès les années 50, intégré l’évolution des techniques, tout en développant sans cesse de nouveaux langages et de nouvelles manières d’écrire et de jouer la musique, tout comme le renouveau de la musique baroque a amené les musiciens classiques à repenser à grands frais le statut de l’interprète et les notions musicales généralement admises.
Aujourd'hui, les jeunes musiciens ont été nourri à cette diversité, et ils sont de plus en plus nombreux à métisser leurs compétences musicales, les amenant à repenser leur métier de musicien.
Il faut enfin ajouter combien la demande de pratique de la musique s’est accentuée, mais aussi que cette demande ne se coule pas toujours aisément dans les offres de formation des institutions.
Pourtant, nombreux sont les musiciens, professeurs ou médiateurs occasionnels, qui œuvrent aujourd'hui au renouvellement des pratiques d’enseignement et de formation : parfois dans le cadre discret d’une classe, parfois au grand jour dans des programmes nouveaux, parfois dans des lieux non institutionnels et sur des terrains dont la variété et l’originalité rend difficile leur énonciation.
Ces rencontres des JFREM proposent d’explorer cette effervescence en s’attardant à décrire des expériences qui en rendent compte, tout en permettant une approche davantage problématisée de la diversité de la, ou des, pédagogie(s) de la musique dans cette ère nouvelle.
Pour mener une telle approche, il faut distinguer quelques axes. Si ceux qui sont proposés se recoupent quelque peu, assez inévitablement du fait de l’objet commun qu’ils poursuivent, ils dégagent toutefois chacun un champ d’interrogation spécifique permettant d’inscrire dans leur contexte telle expérience ou telle réflexion à même de nourrir le thème général.
Il n’est guère possible de recenser l’ensemble des pratiques pédagogiques ou des pratiques musicales qui ont enrichi ces dernières années l’éducation musicale. En revanche il est aujourd'hui opportun de faire part d’expériences qui ont amené à penser des dispositifs artistiques et pédagogiques nouveaux, soit dans les institutions existantes, soit en-dehors de celles-ci, et de réfléchir sur ce qui dans les procédés pédagogiques a été aménagé, comment et pourquoi. Ceci devrait aider à dégager des pistes de recherches renouvelées et enrichies.
Que ce soit dans les institutions régulières, les écoles associatives ou dans l’enseignement scolaire, les professeurs de musique se retrouvent parfois à même de devoir inventer ou aménager des dispositifs d’enseignement, voire des cursus entiers, pour tenir compte soit de nouvelles pratiques de la musique, soit de la nécessité d’intégrer dans leurs cours ou dans les activités des élèves des éléments nouveaux. Ceux-ci visent tantôt à renouveler l’intérêt des élèves, tantôt à diversifier les répertoires ou les manières de faire faire de la musique au départ de procédures musicales variées. Les modalités de l’enseignement se multiplient, que ce soit dans les cours individuels, l’enseignement collectif ou dans les pratiques d’orchestre à l’école. Ainsi les professeurs ont parfois recours à des dispositifs nouveaux ou adaptés à leur enseignement au départ d’autres musiques ou d’autres pratiques : répertoires élargis, attitudes développées en musique ancienne ou à la musique contemporaine face à la partition, pratiques d’écriture des élèves, pratiques d’ensemble plus fréquentes ou inédites… Ce premier axe évoque les situations et les dispositifs qui ont donné naissance à des pratiques d’enseignement/apprentissage renouvelées en décrivant à la fois les situations de départ, les intuitions et les envies d’aménagement des procédés habituels, les résultats auxquels on est parvenu, et enfin les perspectives qu’ouvrent de telles démarches ainsi que les questions de recherches qu’elles sont à même de proposer.