Il n'y a pas de place pour l'aléatoire dans un apprentissage (P. Meirieu)

Nous sommes quatre professeurs en musiques actuelles, Pierre Michel (guitare), Vanessa Dumont (voix), Joseph Yousfi (guitare/basse/MAO) et Chloé Tridot (voix). A travers les différentes lectures, recherches et analyses que nous avons faites, autour des notions : pratiques sociales de référence, sens de l’apprentissage et institution, en vue d’animer un séminaire au Cefedem, nous avons constaté que celles ci sont indissociables comme le dit Philippe Meirieu dans son dictionnaire: "Pour qu'il y ait activité, il faut qu'il y ait tout à la fois un projet et une institution". Nous avons donc soulevé la problématique suivante : les pratiques sociales de référence et l'institution influencent nos choix et donne un sens à nos apprentissages. Nous nous sommes demandés alors comment en tant que professeur, nous pouvons nous aider de ce concept des pratiques sociales de référence pour réfléchir au fait qu’un apprentissage peut avoir du sens pour un élève au sein d'une institution. En effet, pour trouver du sens à ce qu'il apprend, un élève a besoin de trouver des rapports entre ce qu’il connait et ce qu’il apprend. Nous avons pris comme référence l'étude de Fernando Segui: Pratique sociale des élèves/Pratiques sociales des enseignants

En quoi le concept des pratiques sociales de références permet-il une prise de conscience de tout ce qui a trait de manière implicite aux différents conditionnements, aux différentes représentations et habitus que peuvent mobiliser les divers acteurs dans un apprentissage? 

Nous nous sommes intérrogés sur l’existence d’un « apprendre sans travailler », ou sans en avoir conscience, en découvrant l'analyse de Geertz: La didactique des arts plastiques. L'école a le monopole de l’apprentissage dans sa manière de faire or, il est possible d'apprendre en s'attelant directement à la tâche. « Les pratiques sociales de référence constituent un élément fondamental dans la structuration de séquences didactiques. Cette notion fait appel au principe du fonctionnement culturel des savoirs tel que défini par Geertz (1986 ) ». « En didactiques, les pratiques sociales de référence, comme leur nom l'indique, constituent des activités non-didactiques (dépourvues d'intention didactique) dans lesquelles un certain objet de savoir fonctionne. En ce sens, elles peuvent constituer un système antagoniste au système didactique proposé par l'enseignant dans lequel sont supposés fonctionner les savoirs enseignés. » Pour Geertz, les pratiques sociales de référence sont liées au milieu culturel, et social. Pour lui l’élève évolue dans son apprentissage s’il y trouve un rapport avec son « champ social de signification ».

Cela rejoint la définition de Meirieu de "la situation d'apprentissage": « Situation (ensemble de dispositifs) dans laquelle un sujet s'approprie de l'information à partir du projet qu'il conçoit. Il s'appuie, pour ce faire, sur des capacités et des compétences déjà maîtrisées qui lui permettent d'en acquérir de nouvelles. Les situations d'apprentissage peuvent ainsi apparaître en dehors de toute structure scolaire et de toute programmation didactique. » Le professeur, lors d'une séquence didactique, a surement intérêt à faire références aux pratiques sociales de l'élève afin de baser son enseignement sur des compétences/capacités déjà intégrées. Le nouveau savoir sera plus "digeste", et l’élève lui trouvera directement un intérêt.

Le travail de recherche de séminaires nous a permis de nouvelles façons de penser l'enseignement. En prenant en compte les pratiques sociales de référence, le professeur part des compétences déjà acquises de l’élève. Ces compétences peuvent provenir de différentes sources. Qu'elles soient apprises dans la sphère de la famille, ou de l'école par exemple, elles permettent de créer des situations d'apprentissage mettant en tension les compétences déjà acquises des élèves et de nouveaux savoirs. Au-delà des compétences, l’élève fait le lien entre le contexte de son apprentissage de la musique et celle de sa vie plus généralement. Dans cette manière de faire, l'élève est au "cœur de la dynamique de l'apprentissage" comme le dit Philippe Meirieu  dans son livre Apprendre oui mais comment. On retrouve ici l'aller-retour entre les pratiques sociales de référence de l'élève (ce qu'il y a à l'intérieur) et le nouveau savoir, extérieur à lui. Lors d'une situation d'apprentissage, l'élève se sert de ses capacités qui lui permettront de contourner une nouvelle difficulté, et d'acquérir un nouveau savoir. Ce procédé permet à l'élève de contextualiser son apprentissage, de le ramener à quelque chose de connu et ainsi de trouver du sens à son apprentissage. De plus, dans son livre, "Des lieux communs aux concepts clés" Philippe Meirieu nous dit: "Il faut que chaque sujet soit interpellé et mis en activité mentalement parce qu'on lui parle un langage accessible, parce qu'on lui propose d'intégrer des exigences grâce auxquelles il va revoir son système de pensée, découvrir de nouveaux modèles intelligibilités du monde, c'est à dire construire de nouveaux savoirs." Si le professeur veut que son élève progresse, il doit prendre en considération ses connaissances acquises afin de construire d'autres connaissances solides, dans ce que Vigortski appelle, "sa zone proximale de développement". Son apprentissage devient une suite logique de connaissances qui s'imbriquent comme une maison en construction, avec pour fondations ses pratiques sociales de référence. Afin que tout cela fonctionne, il faut un cadre qui peut être donné par une institution qui d'après Meirieu "structure les places afin que chacun sache ce qu'il peut faire et dans quel cadre il peut agir en tant que, ou parler en tant que."

Grâce au travail effectué en amont et lors du séminaire, nous nous sommes rendus compte qu'enseigner quelque chose à quelqu'un n'est pas juste être vecteur d'une information didactique. Pour que l'apprentissage soit réussi, il faut qu' il ai du sens. Lors du séminaire nous avons pris conscience que la plupart de nos collègues ont de réelles pratiques sociales de référence en tant que musiciens, différentes selon les esthétiques de prédilection de chacun et qu'ils les utilisent pour transmettre leur savoir. Cependant, nous avons eut l'impression qu'ils ne prenaient pas forcément en compte les pratiques sociales de référence de leurs élèves et qu'ils avaient du mal à quitter leurs habitus de professeurs de musique, dans le sens où ils transmettent de la même manière qu'ils ont appris. Prendre en compte les pratiques sociales de référence de l'élève et considérer les siennes, peut permettre au professeur à la fois de créer des situations d'apprentissage cohérentes avec son passé et celui de l'élève, mais aussi de les dépasser dans sa transposition didactique. Dans son article "Mais où est donc passé l'étonnement", P. Meirieu, engage les enseignants à déceler les représentations et les cadres de pensée qui animent les apprenants et à les confronter à d’autres conceptions et modèles théoriques. De la sorte, les apprenants pourront s’interroger sur les représentations et théories qui orientent parfois implicitement leurs actions et leurs pensées au contact d’idées et de conceptions nouvelles. C’est également par le biais de la nouveauté et de l’étonnement qu’ils pourront éventuellement remettre en question certaines de leurs représentations et en intégrer de nouvelles. Avoir conscience de tout ce qui fonde une personne élève, serait la clé pour pouvoir mettre en place des pédagogies nouvelles, susciter la curiosité de nos élèves afin de développer chez eux une appétence pour l'apprentissage, la recherche et la pratique autonome dans le domaine musical. Bien sur, tout cela n'est possible que dans une situation de confiance, car il s'agit de dévier le chemin, d'utiliser ses connaissance et de les transformer, c'est ce que peut apporter l'institution avec ses cadres et ses repères qui permettent à chacun de savoir où il se situe et ce qu'il peut ou ne pas faire. Ainsi, la personne élève confiante, peut admettre ne pas savoir suffisamment, et accepter de réfléchir dans de nouvelles sphères afin d'atteindre ou de contourner une problématique d'apprentissage. Il apprend ainsi à avoir l'esprit critique, et ouvert afin d'être acteur dans son rapport au monde.  

BIBLIOGRAPHIE RAISONNEE

Vous trouverez ci dessous divers textes et liens commentés qui illustrent notre problématisation énoncée ci dessus.  Nos commentaires sont en en italique dans le texte.

1 Pratiques sociales de référence:  

    Extrait de : https://wikidocs.univ-lorraine.fr/pages/viewpage.action?pageId=117999518

 « Les origines du concept: Le concept de pratique sociale de référence fut élaboré par la recherche en didactique, pour la construction des enseignements, sous la houlette de Jean-Louis Martinand, dans les années 1980. A l’origine de cette notion, il y a une étude de l’enseignement de la technologie au collège qui, depuis les années 1960, avait fortement évolué. Il était passé d’un enseignement divisé en exercices systématiques de dessin technique accompagnés d’apprentissages centrés sur des objets isolés (le targettisme : construction de séquences d’enseignement basée sur l’analyse d’un objet banal et peu motivant), à des modules axés sur des domaines d’activités scientifiques et techniques tels que la photographie, l’électronique, avec la réalisation d’objets techniques. Pour Jean-Louis Martinand (1989), le caractère authentique des pratiques techniques scolairement organisées était essentiel pour répondre aux visées éducatives de cet enseignement. Il ne s’agissait pas de concevoir un enseignement professionnel ou bien de construire des apprentissages systématiques, ni de proposer des activités distantes des réalités industrielles car on se serait éloigné des conditions d’une initiation technique authentique. Martinand interrogea alors les liens entre les buts et les contenus de l’enseignement avec les tâches et les qualifications existantes en dehors de l’école. Le concept de pratique sociale de référence lui fournit un outil pour questionner les activités scolaires en les comparants avec les réalités qu’elles voulaient faire découvrir. Il fonctionnait comme guide d’analyse des contenus, de critique et de proposition. L’idée de référence consistait à localiser les concordances et les différences entre deux situations, dont l’une (la pratique industrielle par exemple), était l’objet de l’enseignement, et possédait une cohérence qui devait être transposée dans l’école. »     

Pour Jean-Louis Martinand, les pratiques sociales de référence correspondent à des activités objectives de transformation d’un donné naturel ou humain (pratiques). Elles concernent l’ensemble d’un secteur social, et non des rôles individuels (sociales). Enfin, la relation avec les activités didactiques n’est pas d’identité. Il y a terme de comparaison (de référence).

Lors du séminaire, nous avons expliqué les pratiques sociales de référence en considérant le curriculum de chacun alors que Martinand se réfère au curriculum des activités. Les pratiques sociales de référence nous paraissent être les compétences que l‘élève a acquis dans une certaine activité.

Dans l'article suivant JL Martinand, nous explique l'importance de la prise en compte du curriculum d'une activité et de celui qui l'accompli. Pour lui, cela permet à l'enseignant de ne jamais considérer comme juste et irréprochable, l’enseignement qu'il propose.    

https://cdn.reseau-canope.fr/archivage/valid/feuilletage-pratiques-sociales-de-reference,-et-autres-concepts-N-15188-22095.pdf

"..... le concept de référence visait à poser la question des écarts toujours présents entre ce qui se fait « à l’école » et ce qui se fait dans le monde « extérieur » du travail, de la famille, des loisirs ou le monde « juvénile » pour les spécifier et les contrôler, afin que les activités aient une signification hors de l’école. Le concept visait donc à inciter à la réflexion approfondie, du point de vue de l’orientation stratégique éducative aux écarts « subis » (tout ne peut être identique à l’école et dans le monde – ressources, tâches et problèmes, rapports sociaux…) et surtout aux écarts « nécessaires », toute éducation ou formation ne devant pas seulement s’inscrire dans l’ici et le maintenant du milieu environnant, mais s’ouvrir à l’ailleurs, au passé et au futur imaginable des pratiques socio-techniques prises comme références ;"

  • Livre : Pédagogie : Des lieux communs aux concepts clés de Philippe Meirieu:  ​

​Distinction entre « tache » et « objectif »: Un sujet peut parfaitement avoir acquis et maitriser une compétence mais ne pas avoir produit la performance demandée.  L'activité scolaire doit faire échapper l'apprentissage à l'aléatoire : « si on veut que les élèves engagent une activité d'apprentissage, il faut s'assurer qu'ils sont capables d'accéder à ce qu'on leur demande » Vygorsky. Zone proximale de développement : il faut que ce qu'on leur demande soit suffisamment difficile pour les amener à progresser et suffisamment accessible pour ne pas les décourager. De plus, il faut mettre à la disposition des élèves des matériaux et des consignes pour qu'il puisse vraiment se mettre au travail : textes, docs, consignes... Activité mentale : Structure de la situation d'apprentissage. Il faut que chaque sujet soit interpellé et mis en activité mentalement parce qu'on lui parle un langage accessible, parce qu'on lui propose d'intégrer des exigences grâce auxquelles il va revoir son système de pensée, découvrir de nouveaux modèles intelligibilités du monde, c'est à dire construire de nouveaux savoirs.

Philippe Meirieu nous explique ici que ce que l’on demande aux élèves doit être suffisamment difficile pour les amener à progresser et suffisamment accessible pour ne pas les décourager.

  • Livre : Faire construire des savoirs de Gérad De Vecchi

Pour Gérard de Vecchi, «donner du sens à une activité, ce sera agir de telle sorte que l’apprenant soit  « présent» et qu’il ressente l’intérêt du savoir abordé. Cela doit donc se matérialiser par la mise en relation d’un savoir avec ce qu’est la « personne-élève » : ses problèmes, les questions qu’elle se pose, son histoire, ses envies, ses besoins conscients (voire inconscients) »

La plupart du temps, l’élève apprend un savoir sans vraiment sentir son utilité dans sa vie quotidienne. L’enseignant doit aider l’élève à être concerné, par exemple en lui donnant des objectifs d’apprentissage, une méthodologie de travail.

2 Sens de l'apprentissage

  • Livre : Apprendre oui mais comment ? de Philippe Meirieu

Résumé : Penser l'apprentissage : Elle s’articule autour de deux chapitres, « Peut-on apprendre ? » et « Qu'est-ce qu'apprendre ? ». Dans le premier chapitre Philippe Meirieu, met en avant l’acte d’apprentissage. Pour cela il développe deux types de pédagogie, la promotion de l’endogène (def: qui prend naissance à l'intérieur), qui place l’élève au cœur de la dynamique de l’apprentissage et l’organisation de l’exogène (def : qui vient du dehors), qui souligne l’importance de l’intervention et de la transmission. Il explique la difficulté de choisir entre ces deux méthodologies et propose de les mettre en balance, en tension. « L’apprentissage est une histoire qui met en présence un déjà-là et une intervention extérieure ».

Extraits : « ....nous pouvons donc affirmer qu'il y a situation d'apprentissage quand on s'appuie sur une capacité pour permettre l'acquisition d'une compétence, ou sur une compétence pour permettre l'acquisition d'une capacité. On peut alors nommer « stratégie » l'activité originale que déploie le sujet pour effectuer cette acquisition. »

« L'apprentissage est bien production de sens par interaction d'informations et d'un projet, stabilisation de représentation, puis introduction d'une situation de dysfonctionnement où l'inadéquation du projet aux informations, ou des informations au projet, contraint à passer à un degré supérieur de compréhension. »

Dans cette manière de faire, l'élève est au "cœur de la dynamique de l'apprentissage". On retrouve ici l'aller-retour entre les pratiques sociales de référence de l'élève (ce qu'il y a à l'intérieur) et le nouveau savoir, extérieur à lui. Lors d'une situation d'apprentissage, l'élève se sert de ses capacités qui lui permettront de passer une nouvelle difficulté, et acquérir un nouveau savoir. Ce procédé permet à l'élève de contextualiser son apprentissage, à le ramener à quelque chose de connu et ainsi trouver du sens à son apprentissage.

  • Britt-Mari BARTH « L’apprentissage de l’abstraction », collection RETZ, 1987, Edition revue et augmentée en 2001, 255 pages. 

Résumé : La démarche proposée ici veut rompre avec un enseignement magistral qui souvent n’implique pas intellectuellement l’élève et ne lui apporte pas nécessairement un apprentissage significatif. Britt-Mari Barth désire inciter les pédagogues à mettre en œuvre des situations d’apprentissage plus variées qui permettent à un plus grand nombre d’élèves de construire eux-mêmes leur savoir tout en donnant une formation à la réflexion.

 Il y a souvent une trop grande distance entre le contexte quotidien de l’enfant et l’enseignement magistral. L’appropriation et la transformation du savoir de l’enseignant pour les adapter aux pratiques sociales de référence nous parait très important. L’enseignement magistral, avec seulement de la théorie, et aucune pratique nous parait utile dans certains cas mais il est important pour l’élève de pouvoir appliquer la théorie. Et aussi, pour l’enseignant de s’adapter si les élèves « décrochent ».

  • Livres  de Michel DEVELAY :  Donner du sens à l’école collection Pratiques et enjeux pédagogiques, Juillet 1976.

Résumé : L'École est en crise comme la société est en crise. Les élèves, les enseignants et les parents s'interrogent : " À quoi sert l'École ? À quoi ça sert de faire des maths ou de la géographie ? Pourquoi chercher à réussir quand on n'est pas sûr, avec un diplôme, d'avoir du travail ? " Le présent est vécu en rupture avec ce qui l'a précédé, le futur est incertain. La question du sens est posée. Comment aider les enfants à trouver du sens à l'École ? Michel Develay montre que l'École est en crise parce que les réalités et les valeurs qu'elle véhicule s'opposent en partie à celles de la société. Comprendre le rapport des élèves au savoir et à la loi est le fondement de la professionnalité de l'enseignant qui doit permettre aux élèves de donner du sens à l'École et à ce qu'ils y font. Des pistes d'action concrètes sont ainsi proposées pour que l'École retrouve sa justification aux yeux de tous : un lieu d'étude (schola) où le savoir (sapere) a de la saveur. Un ouvrage qui aide à penser et qui permet d'agir.

Les élèves passent un certain temps sur les bancs de l'école à se demander pour quelles raisons ils apprennent certaines choses. En musique cela peu sembler similaire par exemple, si l'on considère un flutiste qui apprend la clef de fa en cours de formation musicale Ils peuvent concrètement se demander à quoi cela lui servira étant donné qu'il n'en n'a pas sur les partitions qu'il travaille avec son professeur. Toujours relier l'apprentissage à la pratique nous parait d'une importnace capitale pour que l'élève soit investi et motivé dans son apprentissage. 

3 Institution: 

Pour Philippe Meirieu, pour qu'un enfant trouve sa place, il lui faut un projet ce qu'il est puisse s'exprimer mais à l'intérieur d'un cadre clair, d'une institution.  

https://www.meirieu.com/DICTIONNAIRE/projet.htm

Mais un projet ne suffit pas : pour que chacun trouve une place, il faut « quelque chose » de plus, une « institution ». Faute d'institution, le projet peut tourner à la cacophonie, voire basculer dans le chaos. L'institution, en revanche, structure les places afin que chacun sache ce qu'il peut faire et dans quel cadre il peut agir. Instituer, c'est confier des rôles et autoriser chaque participant à « agir en tant que ». C'est très important « d'agir en tant que... », « de parler en tant que... », « d’exercer son autorité en tant que... ». Un enfant qui n'a pas de place, agit au nom de ses seuls caprices et il impose souvent sa volonté aux autres au nom de ses seuls désirs. Un enfant qui est responsable de quelque chose de précis, qui a un rôle reconnu dans une organisation collective, une « compétence » identifiée (au plan quasi juridique du terme) peut exercer un pouvoir légitime dans un groupe : « J'interdis de cueillir ces fleurs en tant que responsable des plantations... », « je demande que chacun prenne la parole à son tour en tant que responsable de la bonne organisation du débat... ». Voilà un moyen d'avoir une vraie place, de renoncer à sa toute-puissance pour accéder à l'exercice d'un pouvoir légitime dans un groupe.

Au sens général, l'institution est un  ensemble de valeurs, de normes et de pratiques communes à un certain nombre d'individus qui organisent et structurent de façon stable leurs relations. De ce point de vue, pour la plupart des sociologues, la famille, l'école ou encore l'entreprise sont des institutions.

• Pour Marcel Mauss et Paul Fauconnet, les institutions sont "un ensemble d'actes et d'idées tout institué que les individus trouvent devant eux et qui s'imposent plus ou moins à eux...

Nous entendons donc par ce mot aussi bien les usages et les modes, les préjugés et les superstitions ou les organisations juridiques essentielles." Par exemple le langage est une institution. Ces deux auteurs ont donc une vision élargie de la notion d'institution qui est assez proche de celle du fait social chez Emile Durkheim et qui constitue pour eux l'objet d'étude de la sociologie. Pour Emile Durkheim en effet, la sociologie peut être définie comme "la science des institutions de leur genèse et de leur fonctionnement". 

• Max Weber désigne par institution tout "groupement dont les règlements statutaires sont octroyés avec un succès relatif à l'intérieur d'une zone d'action délimitable à tous ceux qui agissent de façon définissable selon des critères déterminés."

La conception de Max Weber de l'institution est donc plus restreinte que celle des Durkheimiens. Pour lui, une institution est donc une organisation composée d'un corps de professionnels qui détiennent, en lien avec leur fonction, une autorité légale rationnelle sur un groupe d'individus ou sur la société toute entière. 

• Dans le domaine de la sociologie politique, le terme d'institution prend un autre sens puisqu'il désigne l'ensemble des composantes de l'Etat qui ont pour fonction principale d'assurer la régulation des rapports sociaux.  https://www.universalis.fr/encyclopedie/institution/  

Définition institution. • http://www.cnrtl.fr/definition/institution

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